mercredi 29 janvier 2014

Le tutorat, élément de la flexibilité de la FOAD



J’ai indiqué précédemment que l’individualisation de la FOAD relevait, selon moi, de l’ingénierie pédagogique (http://blogdetad.blogspot.fr/2014/01/lndividualisation-element-de-la.html). La personnalisation, qui sera l’objet de ce billet, a pour cadre la relation tutorale.

Définitions

Dans le billet consacré aux définitions de la flexibilité (http://blogdetad.blogspot.fr/2014/01/quelques-definitions-de-la-flexibilite.html), j’avais relevé celle-ci  qui est centrée sur le pôle « tutorat » de ma figure initiale de la flexibilité : « "[…] mettre en œuvre des formes d'interaction pédagogique plus flexibles basées sur une meilleure prise en compte des caractéristiques de l'apprenant" (UTE) » http://ute3.umh.ac.be/uticef/master/m341/cognitivisme.htm

Je donne la définition suivante de la personnalisation. La personnalisation, en formation, désigne le processus relationnel qui va permettre à l’apprenant de voir pris en compte ses caractéristiques personnelles au cours de sa formation. Elle induit l’établissement d’une « relation privée » entre le tuteur et un apprenant. Fruit de l’établissement d’un climat de confiance, elle ne peut être imposée à l’apprenant mais dépend fortement de l’expression de la demande de ce dernier. Toutes les caractéristiques personnelles d’un apprenant ne sont pas forcément prises en compte de la même manière. Dans la relation tutorale, un accent est mis, bien que non exclusif, sur les caractéristiques de l’apprenant qui impactent son apprentissage.

Pour mémoire, je reprends, ici, la définition de Wikipédia sur le tutorat à distance à laquelle j’ai fortement contribué : « Le tutorat à distance est la juxtaposition des concepts de tutorat et de distance. Il a pour principal objectif de soutenir les efforts d'apprentissage dans le cadre d'un projet de formation ouverte et à distance. Il aide à rompre l'isolement et à atteindre les résultats des objectifs pédagogiques des apprenants. […] La fonction tutorale ou plus exactement les fonctions tutorales sont très variées selon les contextes et/ou les dispositifs de formation. Ces fonctions sont le plus souvent décrites dans une charte tutorale qui rassemble les droits et devoirs du tuteur vis-à-vis de l'institution qui l'emploie et des apprenants qu'il encadre. […] Le tuteur intervient auprès des apprenants sur différents plans : cognitif, motivationnel, socio-affectif et métacognitif. Le tuteur peut être l'expert de contenu du cours enseigné ou uniquement un assistant pédagogique. Les champs d'interventions tutorales (sur le contenu didactique, administratif, méthodologique, technique, etc.) peuvent être répartis entre différentes personnes et des ressources de support à l'apprentissage. On parle alors de système tutoral. Le style de tutorat est lié à l'approche pédagogique privilégiée dans le dispositif de formation. Par exemple, le tutorat dans sa version non-directive est fortement imprégné des techniques de relations d'aide (attitude de non jugement ; écoute active ; capacité d'empathie).

Les conditions de la personnalisation

La personnalisation n’est rendue possible que lorsque certaines conditions sont réunies. Du côté de l’institution, la personnalisation ne peut se limiter à être une valeur et une démarche affichées ou revendiquées mais elle doit s’incarner dans la mise à disposition de moyens humains, temporels et matériels.  Dès lors, cela suppose que l’institution ait défini une stratégie tutorale, organisé les services tutoraux, aménagé des conditions d’exercice de leurs fonctions par les tuteurs qui soient compatibles avec les objectifs affichés.
Pour les tuteurs, s’engager dans la personnalisation du support à l’apprentissage nécessite des connaissances sur les leviers de la personnalisation, la maitrise de certaines interventions et l’adoption d’une posture. Il s’agit donc pour eux de développer  des compétences leur permettant la prise en compte des caractéristiques de chaque apprenant.

La personnalisation du tutorat ne peut être imposée à un apprenant. Le tuteur peut inviter l’apprenant au dialogue mais il ne peut  l’obliger à dévoiler  ses caractéristiques personnelles. L’obligation serait contreproductive car, à travers elle, l’apprenant percevrait davantage le tuteur comme un inquisiteur que comme une personne-ressource.  Ceci aurait, au final, des conséquences négatives sur l’instauration du climat de confiance nécessaire entre lui et le tuteur pour la réalisation d’un soutien personnalisé.
L’apprenant doit donc s’engager volontairement dans la relation tutorale et le dévoilement de ses caractéristiques personnelles. Certains le feront et d’autres pas. Cela ne présume pas une posture uniquement réactive du tuteur mais sous-tend que l’apprenant se sente autorisé à livrer des informations sur qui il est comme apprenant. Ceci suppose notamment le développement de sa capacité à la métacognition.



Quelques interventions tutorales visant la personnalisation du soutien à l’apprentissage

Les interventions du tuteur pouvant déboucher sur la personnalisation de son soutien sont relatives à l’identification des objectifs personnels de l’apprenant, ses compétences, sa disponibilité spatio-temporelle, ses préférences cognitives, sa motivation, sa capacité à exercer son autonomie. (cf. billet précédent : http://blogdetad.blogspot.fr/2014/01/les-caracteristiques-de-lapprenant.html)

Ces interventions doivent inviter au dialogue, prendre la forme de suggestion d’activités, en particulier sur le plan métacognitif dont Yolande Ouellet définit le champ à travers le tableau ci-dessous (http://recit.org/metatic/Re-traces-ton-processus)



Par ailleurs, il est primordial que le tuteur garde trace de l’ensemble de l’historique de sa relation avec l’apprenant pour être en mesure de personnaliser ses interventions. Le tracking offert par les LMS se révèle insuffisant car ne prenant pas en compte les médiations qui ont lieu en dehors de la plateforme, par exemple sur les réseaux sociaux mais également par téléphone.  Dès lors des outils de suivi doivent être conçus. Il est bien évidemment préférable qu’ils le soient par l’institution afin d’assurer la cohérence de pratiques entre les tuteurs.

lundi 13 janvier 2014

Les caractéristiques de l'apprenant, élément de la flexibilité d'une FOAD


Dans ce billet, je m’intéresse aux caractéristiques des apprenants dont la prise en compte peut rendre plus ou moins flexible une FOAD.

Les objectifs personnels de l’apprenant
La prise en compte des objectifs personnels de l’apprenant nécessite tout d’abord de les identifier, de les situer, par exemple sur la pyramide de Bloom, puis de les rapprocher des objectifs académiques de la formation. 



Les compétences de l’apprenant
De la même manière que les objectifs, elles doivent être inventoriées et décrites en termes de savoir, de savoir-faire et de savoir-être. Il est particulièrement intéressant d’examiner les compétences de l’apprenant à être apprenant à distance.


Les prérequis de l’apprenant
Le contrôle de la maîtrise des prérequis de la formation par l’apprenant permet de le diriger/conseiller/suggérer/inviter à suivre le parcours qui lui est le plus adapté ou vers d’autres formations préalables.

Temps de formation de l’apprenant
A quels moments l’apprenant réalisera-t-il sa formation : durant son temps de travail, sur son temps personnel, en soirée, le week-end ? Combien d’heures par jour, semaine, mois pourra-t-il consacrer à son apprentissage ? Il est à noter que plus le parcours contient de séquences collaboratives et/ou synchrones, moins le dispositif permet à l’apprenant d’apprendre à son rythme.  La question du temps est aussi à étudier du point de vue de son amplitude : peut-elle être réalisée sur la durée qui convient à l’apprenant ? Ceci pose la question des entrées et sorties en formation, sont-elles libres, plurielles, uniques ?

Espaces de formation de l’apprenant
Dans quels lieux l’apprenant réalisera-t-il sa formation : sur son lieu de travail, à son poste, en centre de ressources, à son domicile, en un autre lieu ? La question des espaces est essentiellement à prendre en compte sous l’angle des horaires d’accès qui peuvent avoir une influence sur le temps de formation. L’environnement peut également avoir une influence sur la qualité du temps d’apprentissage.

Les préférences cognitives des apprenants
L’identification des préférences cognitives des apprenants peut également entrer en compte dans la flexibilité de la FOAD. S’il n’est pas obligatoire de rejoindre en tout temps les apprenants dans leurs préférences cognitives, certaines ressources, en fonction de leur médiatisation, peuvent leur être d’un accès plus aisé. Les principaux couples de ces préférences (un apprenant a une préférence pour l’un ou l’autre des items de ces couples) sont les suivants : auditif-visuel, indépendant-dépendant du contexte, indépendant-dépendant du formateur, synthétique-analytique, producteur-consommateur, formalisation-réalisation.

La motivation de l’apprenant
Dans quelle mesure l’apprenant adhère ou non aux objectifs académiques de la formation ? Poursuit-il à travers la formation des objectifs personnels ? Quel est l’état de sa motivation à l'entrée en formation ? Si la motivation d'un apprenant évolue fréquemment au cours de la formation, il est néanmoins intéressant de la situer car elle influe sur certaines autres caractérisitiques pouvant être prises en compte pour rendre flexible son parcours, en particulier le temps et l'exercice de son autonomie.



La capacité de l’apprenant à faire des choix et à exercer son autonomie
Plus un dispositif est flexible du point de vue de l’apprenant, plus cela lui demande d’exercer son libre arbitre et d’effectuer des choix. Par ailleurs, quel est le niveau d’autonomie de l’apprenant ? Celui-ci peut être positionné sur un continuum allant du non exercice de son autonomie d’apprenant à distance à l’autodidaxie en passant par l’autonomie et l’autoformation. Le recours à des typologies d’apprenants à distance, comme celle de Viviane Glikman (déterminés, marginaux, hésitants, désarmés), peut également permettre de mieux situer l’apprenant.

vendredi 10 janvier 2014

L'individualisation, élément de la flexibilité d'une FOAD

Ce billet est destiné à poursuivre le travail nécessaire de précision sémantique (cf. définitions de la flexibilité) des différents pôles de la flexibilité d’une FOAD. Dans la figure initiale qui sert de base à ma réflexion, l’individualisation est positionnée sur le « pôle ingénierie ». Mais qu’est-ce qu’individualiser ?

Selon une définition attribuée à l’AFNOR, « L’individualisation de la formation s’inscrit dans une démarche générale de recherche d’adaptation du système de formation aux besoins de l’apprenant. Elle peut se définir aussi comme une formation sur mesure. L’individualisation désigne la possibilité pour des apprenants, à partir d’un dispositif de positionnement à l’entrée, d’effectuer des parcours d’apprentissage différents selon leurs besoins et leurs objectifs personnels. L’apprenant se voit proposer un environnement et un contexte de formation (outils, contenu, mode d’apprentissage, calendrier…) qui s’adaptent à son niveau, ses besoins, ses préférences et lui permettent de progresser à son rythme. »

Au regard de cette définition, il apparait clairement que l’individualisation est une affaire d’ingénierie pédagogique. Il s’agit donc pour le concepteur de FOAD désirant rendre individualisable son dispositif de soumettre son travail à quelques principes.

Granulariser et modulariser le contenu. Tâche classique du concepteur, son but est « d’autonomiser » des parties de contenu qui pourront être ainsi assemblées de différentes manières dans des parcours distincts.



Définir les parcours possibles en choisissant les critères qui permettent de les distinguer. Ces derniers peuvent être très variés : niveau d’entrée des apprenants, objectif des apprenants (apprenant visant seulement des objectifs de connaissance et un autre visant des objectifs de maitrise), logique interne du contenu, activités d’apprentissage, d’évaluation, etc.

Assembler les modules constitutifs des différents parcours. Les parcours n’étant pas constitué de tous les mêmes modules, cela a un impact soit sur la durée, soit sur le nombre des activités qui seront attachées à chaque module.

Prévoir le mode d’affectation d’un apprenant à tel ou tel parcours. Le choix peut être du seul ressort de l’apprenant, conseillé ou imposé par l’institution. Dans les deux derniers cas, la réalisation d’un diagnostic sous forme d’évaluation ou d’entretien est nécessaire à prévoir. Il devra permettre d’aboutir à la rédaction d’un Plan Individuel de Formation (PIF) en amont ou au début de la formation.

Choisir le mode de guidance au sein de chaque parcours. Le parcours peut être libre : l’apprenant réalisera les différents modules dans l’ordre qu’il souhaite, entièrement ou partiellement. Le recours aux options, aux activités facultatives et aux modules à contenu ouvert (c’est l’apprenant qui définit le contenu du module) est adapté dans ce type de guidance. Le parcours semi-guidé : il est proposé à l’apprenant de suivre les modules dans un certain ordre mais sans obligation de s’y conformer. Le parcours guidé : l’ordre d’étude des modules est imposé à l’apprenant.

mardi 7 janvier 2014

Quelques définitions de la flexibilité en formation









Il semble difficile de démarrer la réflexion sur les rôles des tuteurs à distance pour rendre plus flexibles les dispositifs sans faire un détour sémantique. Je reproduis donc ci-dessous quelques premières définitions de la flexibilité en formation que j'ai classées sur les trois pôles que j'ai précédemment identifiés. A noter que le pôle "tutorat" est le moins bien fourni...

Définitions centrées sur le pôle « ingénierie »

"Un système flexible de formation est un système impliquant tous les acteurs dans le co-pilotage d'actions de développement au sein d'une dynamique de régulation permanente.

"Une formation flexible est une formation qui permet aux apprenants des entrées et des sorties permanentes." (Educsol) http://eduscol.education.fr/numerique/dossier/archives/eformation/notion-modularite/ouverture-flexibilite


Définition centrées sur le pôle « Apprenant »

"Les élèves disposent d’une multitude de choix de temps et de structures, et peuvent donc décider de bien des modalités de leur apprentissage" (Gerard, W., Wapiti, P., Nagtegaal, J.) http://education.alberta.ca/media/7588684/04environnement.pdf

"J’inclurais là-dedans… l’importance de proposer des choix aux élèves, pour favoriser l’indépendance, la créativité, l’innovation, la pensée critique [et] l’esprit d’entreprise." (Marcinkevics, D.) http://education.alberta.ca/media/7588684/04environnement.pdf


Définitions centrées sur le pôle « tutorat »

"[…] mettre en œuvre des formes d'interaction pédagogique plus flexibles basées sur une meilleure prise en compte des caractéristiques de l'apprenant" (UTE) http://ute3.umh.ac.be/uticef/master/m341/cognitivisme.htm

dimanche 5 janvier 2014

Flexibilité de la FOAD et tutorat à distance par Jacques Rodet


Comme je le laissais supposer il y a quelques jours, je consacrerai, pour partie, cette année 2014, à mener une réflexion autour des rôles des tuteurs pour rendre plus flexibles les dispositifs et permettre aux apprenants, qu’elles que soient leurs caractéristiques, d’y évoluer plus harmonieusement.

Pour ce faire, mon point de départ sera d’explorer et d’enrichir cette première figure où sont identifiés les trois pôles principaux qui dimensionnent, selon moi, la flexibilité.



Le point d’orgue, mais non final, de cette réflexion sera le colloque "Flexibilité des apprentissages et du tutorat dans la Formation Ouverte et à Distance et Hybride" que je co-organise avec Margarida Romero et Jean Heutte dans le cadre de l’ACFAS, le 12 mai 2014 à Montréal.

Les thématiques que je me propose donc d’explorer dans les prochaines semaines sont les suivantes :
  • Les besoins de flexibilité des apprenants
  • Les bonnes pratiques d’ingénierie pédagogique favorisant la flexibilité
  • Les bonnes pratiques tutorales favorisant la flexibilité

A très bientôt !