mercredi 11 novembre 2020

Graphe de périmètre tutoral

Ce billet présente un outil graphique, pouvant être aisément réalisé sur un outil de dessin, permettant d'identifier sa pratique tutorale au regard des objectif tutoraux génériques poursuivis. 

Les objectifs tutoraux génériques (cf. Pratiques du tutorat à distance. Livret d'interventions) sont identifiés au croisement des fonctions tutorales et des plans de support à l’apprentissage. Ils sont au nombre de 28. 


Les tuteurs à distance, mais aussi les institutions qui les emploient, peuvent tirer un grand bénéfice à identifier les objectifs de soutien à l’apprentissage qui sont les leurs. Si chacun des objectifs tutoraux génériques a sa pertinence, il est bien rare que tous puissent être retenus dans le cadre d’un digital learning. Il s’agit donc de les prioriser et pour cela de procéder à certaines actions d’ingénierie tutorale (cf. L'ingénierie tutorale). Toutefois, il est fréquent que les institutions ne définissent que peu ou pas leur stratégie tutorale. Aussi, le graphe du « Périmètre tutoral » ci-dessous peut permettre de cartographier le positionnement du tuteur par rapport aux objectifs tutoraux et d'identifier le positionnement de l'institution vis à vis du tutorat à distance. 


Pour chaque plan de support à l’apprentissage (cognitif, socio-affectif, motivationnel et métacognitif), 7 objectif tutoraux génériques peuvent être investis. Il s’agit pour le tuteur à distance d’identifier, pour chacun, s’il fait l’objet, de sa part, d’interventions auprès des apprenants et ce qu’elles que soient les modalités retenues. Pour chaque plan de support à l’apprentissage, un indice est calculé de manière simple. Si par exemple, sur les 7 objectifs tutoraux génériques du plan de support cognitif, il est identifié des interventions tutorales effectives pour 5 d’entre eux, l’indice est de 5. En procédant de la sorte pour chaque plan de support à l’apprentissage, il est possible de tracer l’aire correspondant au périmètre d’interventions du tuteur.   

Exemple tiré de ma pratique dans l’UE Ingénierie tutorale du master MFEG de Rennes 1

Après avoir examiné mes pratiques, il apparaît que certains objectifs tutoraux génériques ne font pas l’objet d’interventions tutorales de ma part. 

Faire émerger les objectifs personnels de l’apprenant. Mon UE étant planifiée trois mois après le début du master, cet objectif n’est pas déterminant pour mon accompagnement dans la mesure où il a déjà fait l’objet d’interventions lors du recrutement et par les enseignants qui animent l’ouverture du master. 

Les objectifs tutoraux Aider à maîtriser l’environnement d’apprentissage - Susciter l’entraide technique entre apprenants - Encourager l’utilisation des outils ont également fait l’objet d’interventions auprès des étudiants en amont de la tenue de mon UE. 

Faire conscientiser ses préférences cognitives - Faire identifier les motivations intrinsèques - Aider à s’autoévaluer ne font généralement pas l’objet d’interventions de ma part même si cela peut arriver pour des étudiants rencontrant des difficultés spécifiques. 

Le tableau des objectifs tutoraux que j’investis s’établit donc ainsi :


5 objectifs tutoraux génériques du plan cognitif étant investis, son indice est de 5, de 6 pour le plan socio-affectif, de 4 sur le plan motivationnel et de 6 sur le plan métacognitif. 

Le graphe de mon périmètre tutoral est matérialisé par la zone en gris (la zone en pointillé indique le périmètre pouvant être investi pour des étudiants ayant des besoins plus spécifiques) : 



Usages du graphe de périmètre tutoral  

Comme indiqué ci-dessus, le graphe de périmètre tutoral peut être utilisé par les tuteurs à distance pour situer leurs pratiques. Dans ce cas, il a une fonction descriptive permettant la prise de recul réflexif. 

Il peut également être utilisé par les institutions pour définir une stratégie tutorale globale. 

Les concepteurs des dispositifs tutoraux peuvent aussi s’en servir pour prescrire les profils de tuteurs à distance.

Limite du graphe de périmètre tutoral

Il s'agit d'une représentation graphique essentiellement quantitative qui ne peut réellement remplacer la réalisation de deux des livrables de l'ingénierie tutorale, à savoir "le système tutoral" qui permet d'analyser et de prioriser les besoins de soutien des apprenants et de "l'audit tutoral" qui vise à évaluer le dispositif tutoral et à faire des préconisations pour l'améliorer. 

mardi 3 novembre 2020

10 conseils pour déconfiner à distance les apprenants

Le confinement, c’est la réduction des rencontres physiques mais ce ne peut être l’absence d’interactions sociales. En ce début de deuxième période de confinement (notez bien que je ne parle pas de seconde…) l’activité de formation est déportée à distance. Si lors du premier confinement, les acteurs de la formation ont mis à disposition de nombreuses ressources en ligne et réalisé une multitude de webinaires, souvent expositifs, le décrochage de nombreux apprenants a mis en lumière plusieurs vérités trop souvent oubliées : 

  • Il est impossible de reproduire à distance ce que l’on fait en présentiel sans risque de perte affectant directement l’atteinte des objectifs. Il faut donc faire différemment. 
  • La formation s’incarne dans la rencontre et l’échange entre personnes. 
  • Aucune ressource, quelle que soit sa qualité, ne peut remplacer la réflexion argumentée et la construction du sens qu’offre les échanges entre apprenants et formateurs. 
  • Tous les apprenants ne sont pas égaux face aux difficultés liées à la distance. 
  • L’autonomie de l’apprenant ne peut être érigée en préalable mais est à considérer un objectif à poursuivre. 
  • La distance oblige à rééquilibrer la proportion d’activités d’apports et de soutien à l’apprentissage. Il faut donc « enseigner moins pour qu’ils apprennent plus » 
C’est sur ce dernier point que je veux plus particulièrement attirer l’attention à travers 10 conseils pour déconfiner à distance les apprenants. 


Chaque apprenant confiné dispose de conditions matérielles et environnementales différentes. Pour ceux qui sont le plus dans l’inconfort, le risque de décrochage est accru. Il s’agit donc, à partir des éléments recueillis, de convenir avec chaque apprenant des aménagements de la formation lui permettant de poursuivre son apprentissage. 

Si les outils de communication sont nombreux, les préférences des formateurs pour tel ou tel ne doivent pas être imposées aux apprenants. Bien au contraire, il s’agit de rejoindre les apprenants dans leurs habitudes communicationnelles et de privilégier le ou les outils qui font consensus tant en termes de fonctionnalités que d’accessibilité par tous. 

La relation tutorale pour exister doit bien évidemment être une proposition faite aux apprenants sans ambiguïtés mais elle gagne à être contractualisée à travers une charte tutorale précisant les droits et les devoirs des formateurs et des apprenants entre eux. 

La littérature sur le tutorat à distance est abondante et les besoins de soutien des apprenants à distance sont largement décrits. Il est nécessaire de les contextualiser et de les prioriser au regard du public et du format de la formation puis de prévoir la manière dont il sera possible d’y répondre. Il s’agit donc de produire un scénario tutoral. 

Chaque apprenant apprend différemment et à un rythme qui lui est propre. Si le parcours de formation est forcément balisé et rythmé par les communications synchrones, il est souhaitable de laisser aux apprenants des possibilités de choix dans la planification de leurs activités. Et comme tous les apprenants ne sont pas égaux en matière d’habileté à planifier, il est utile de les aider dans cette tâche. 

« Faire circuler des signes de présence » constitue un levier puissant pour rompre l’isolement des apprenants et prévenir le décrochage. Aussi, tant pour donner des informations sur le déroulement de la formation, que pour manifester ses encouragements, soutenir la motivation, amener les apprenants à adopter une posture réflexive sur leurs stratégies d’apprentissage, le formateur doit communiquer de manière régulière et proactive. 

La réduction du temps entre la sollicitation d’un apprenant et la réponse du formateur se révèle souvent bénéfique. Aussi, sans exiger du formateur une disponibilité permanente, sa disponibilité doit être définie dans la charte tutorale et faire l’objet de rappels réguliers par le formateur. 

Les temps d’échanges et de mutualisation sont essentiels à la construction des connaissances. Si certains ont lieu directement entre apprenants dans des espaces où le formateur n’est pas présent, cela ne devrait pas l’exonérer d’en organiser de plus formels à certains moments remarquables de la formation tels que les retours sur des productions individuelles ou collaboratives. 

Une des activités les plus formatrices sont les commentaires du formateur sur les productions des apprenants. Que ceux-ci soient réalisés à l’occasion d’une classe virtuelle ou de manière plus personnalisée par écrit, ils gagnent à ne pas être uniquement négatifs ou positifs mais formulés dans un style constructif permettant la poursuite de l’apprentissage. 

Parce que la distance, a fortiori le confinement, n’est pas une condition naturelle, l’aménagement d’espace de prise de recul réflexive sur la manière de la vivre, de la réguler, de l’aménager se révèle un moyen efficace de lutter contre le décrochage.