mardi 15 novembre 2011

De la réactivité quasi instantanée du tuteur à distance. Par Jacques Rodet

Lorsque l’on interroge les apprenants à distance, une des premières qualités qu’ils souhaitent trouver chez leurs tuteurs est la réactivité qui sous-tend une très grande disponibilité. Si dans les chartes tutorales, il est souvent préciser le nombre d’heures durant lequel les tuteurs à distance doivent répondre à un message d’un apprenant, celui-ci se situe à un niveau (72h, 48h, 24h) qui met souvent la patience des apprenants à rude épreuve. 

Par ailleurs, ma pratique, tout comme les échanges sur cette question que j'ai eus avec un collègue québecois, me montrent que les réponses quasi instantanées, moins d’une heure, voire quelques minutes, si elles surprennent les apprenants, sont très appréciées d’eux, en particulier parce qu’elles interviennent au moment où ils réalisent leur activité d’apprentissage.

Faut-il donc que le tuteur à distance soit disponible en permanence, jour comme nuit, semaine comme week-end, périodes normales comme périodes de fêtes ? Faut-il que le tuteur à distance soit toujours connecté pour répondre le plus vite possible aux apprenants ? Quel devrait être le prix d’une telle disponibilité ? Une réponse rapide est-elle toujours de qualité ? Qu’est-ce qui se joue dans la quasi instantanéité ? La forme ne prime-t-elle pas le fond ? La relation ne prime-t-elle pas le contenu ?

Il est matériellement impossible à un tuteur, ne serait-ce que pour des raisons physiologiques, d’être disponible en permanence. La quasi instantanéité ne peut donc être ni réclamée par les apprenants ni exigée par l’institution ni même être contractualisée. Néanmoins, il arrive fréquemment qu’un tuteur soit derrière son écran (d'ordinateur ou de téléphone) et qu’il reçoive à ce moment-là une sollicitation d’un des apprenants qu’il encadre. Dans ce cas-là, et à mon sens, uniquement en cette circonstance, le tuteur peut s’autoriser à répondre immédiatement. La quasi instantanéité n’est donc pas exigible mais il ne faut certainement pas se l’interdire dans la mesure où elle peut être utile à l’apprenant.

Partant de là, il apparaît que cette disponibilité, à temps choisi par le tuteur, non annoncée et non contractualisée, mais survenant à l’occasion, ne devrait pas se traduire par une tarification particulière du service rendu. Dans les conditions citées, elle n’a pas d’impact sur les coûts du tutorat ni sur son modèle économique.

Répondre rapidement peut permettre à l’apprenant de se sentir mieux pris en compte mais ceci n’est valable que si la réponse du tuteur à distance est de qualité. En ce sens, il est préférable qu’elle ne soit qu’un simple accusé de réception précisant la date ou l’heure de l’envoi d’une réponse élaborée si le tuteur n’est pas en mesure de la formuler immédiatement. Si par contre, il s’agit d’une question simple ou d’une question récurrente et que le tuteur peut s’appuyer sur des modèles de réponses ou des réponses antérieures à d’autres apprenants, il est tout à fait envisageable de répondre dans la foulée de la réception du message. Un des facteurs facilitant la quasi instantanéité est donc relatif à l’instrumentation des tâches tutorales qui permet de conserver et de retrouver facilement l’historique de la relation avec l’apprenant concerné et d’accéder à des bases compilant des interventions tutorales passées et des modèles de messages servant de base à la formulation d’une réponse individualisée. Comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire, des avancées sont à effectuer en la matière et l’absence d’outils dédiés à la capitalisation et à la gestion des interventions tutorales montre que les institutions ont encore des efforts à faire pour une prise en compte pleine et entière du tutorat à distance et des tuteurs. 

Répondre rapidement à un apprenant est également de nature à lui rendre service, au moment où il en a besoin. Quand c’est le cas, l’apprenant en est naturellement reconnaissant au tuteur. Cette reconnaissance peut agir positivement sur la relation de confiance et autoriser l’apprenant à solliciter plus aisément son tuteur lorsqu’il en a besoin. 

C’est pourquoi, il me semble que les tuteurs à distance, lorsqu’ils en ont la possibilité, et il est rare de ne l’avoir jamais, devraient réduire le plus possible leur temps de réponse sans que cela devienne ni une obsession, ni une contrainte.

Des recherches sur cette question mais aussi des témoignages d’apprenants permettraient de mieux mesurer les effets de la quasi instantanéité des réponses du tuteur à distance et de confirmer ou non les points avancés dans ce billet.

2 commentaires:

J.-D. Zeller a dit…

Bonjour,

Je suis professeur vacataire dans une école de sciences de l'information. Je n'effectue pas de tutorat à proprement parler mais j'ai tenté il y a quelques années de travailler en forum avec mes élèves. Il m'était impossible de pouvoir répondre aux avalanches de questions survenant et je me suis fixé la règle de répondre tous les soirs, même si les questions me parvenait au fil de l'eau dans la journée.

Je travaille maintenant avec un wiki alimenté par les élèves et nous faisons un point hebdomadaire en présentiel ce qui permet un échange en groupe plus satisfaisant et comme la rédaction s'étale sur 2 mois, cela est praticable.

Enfin, j'ai une dernière expérience en mentorat avec un jeune professionnel distant. Dans ce cadre, c'est la pertinence de la réponse qui compte plus que la réactivité. Au besoin, si la question est urgente, il me le signale.

Pour le reste je suis d'accord avec ta conclusion, la réponse rapide est souhaitable est appréciée mais elle ne peut pas être obligatoire. Ceci reste à être modulé en fonction des rythmes d'apprentissage et de la nature des contenus et devrait faire l'objet d'un accord explicite en début de session. Enfin, se constituer une FAQ auquel on peut renvoyer en cas de question récurente est une excellente idée.

Jacques Rodet a dit…

Merci pour ce témoignage.
Bien cordialement