vendredi 18 décembre 2020

Top 10 2020 des billets du blog de t@d


Le temps des bilans est venu. 

En ce qui concerne le Blog de t@d, cette année, le nombre de billets parus est le plus faible depuis sa création en 2007. Ceci tient a plusieurs raisons. D'une part, beaucoup de choses ont été abordées et dites dans les 840 billets déjà parus. D'autre part, j'ai consacré, en début d'année, l'essentiel de mon temps à la publication de mon dernier livre et à sa promotion. Enfin, la crise sanitaire m'a amené une charge de travail réduisant d'autant mon temps disponible à la publication.

Pour autant, plusieurs billets méritent leur lecture.

Problématique du tutorat à distance s'intéresse, au regard de la pensée complexe et des questions relatives à l'intelligence artificielle, à la manière dont peut être problématiser le tutorat à distance.

Le graphe de périmètre tutoral propose un outil graphique pour décrire les champs d'interventions d'un tuteur à distance.

SDL est une proposition de typologie de digital learning

Le dodécagone est un outil d'analyse d'une ingénierie tutorale réalisée et peut être également utilisé pour déterminer celle qui est à mettre en oeuvre pour un digital learning. 

Les pistes pour une cobotique tutorale proposent plusieurs axes qui seraient à explorer conjointement les spécialistes de l'intelligence artificielle et ceux du tutorat à distance.

Le billet, les deux mamelles du tutorat à distance, est une réflexion sur le fait que si le tutorat est une question d'ingénierie, il est aussi redevable au bricolage des tuteurs, démarches qui loin de s'exclure se complètent

Le module Trois outils au service des tuteurs à distance présentent les usages qui peuvent être du journal de formation, de la carte d'empathie et du sociogramme pour mieux accompagner les apprenants à distance.

En début de deuxième confinement, 10 conseils pour déconfiner à distance les apprenants, se voulait un memento pour tous les formateurs et enseignants assurant la continuité pédagogique.

Le numéro 15 de la revue Tutorales, le premier depuis 3 ans, témoigne de pratiques d'ingénierie tutorale. 

Le clip de présentation de mon dernier livre destinés à tous les formateurs et enseignants devant accompagner des apprenants, étudiants et élèves à distance.

Bonnes lectures et très belles fêtes de fin d'année !

mercredi 9 décembre 2020

A propos de la problématisation du tutorat à distance














Le dernier numéro de "L'interlettre Chemin Faisant du Réseau Intelligence de la complexité - MCX - APC" est largement consacré à la notion de « problématisation ». 

Dans son éditorial intitulé «Problématiser, c’est d’abord modéliser en responsabilisant le modélisateur» Jean-Louis Lemoigne attire notre attention sur l’impasse qui serait celle de ne confier qu’à des machines et autre intelligences artificielles la résolution des problèmes tout en évacuant la dimension humaine et forcément complexe de la construction des réponses qui ne peuvent être que contextualisées et transitoires. Lisons-le : 

«N’est-ce pas cette volonté réfléchie de maintenir ouvert ‘le bon usage de la raison dans les affaires humaines’ s’attachant à la fois à ‘faire pour comprendre en même temps qu’à ‘comprendre pour faire’ qui incite aujourd’hui à questionner les méthodes et recettes de type algorithmique automatisant les ‘résolutions de problème’ devant conduire aux présumées ‘meilleures décisions’ ? Chacun sait d’expérience que l’application de procédures automatisées dont on ne connait ni ne comprend l’organisation (conçue par un par un tiers ignorant des multiples spécificités des contextes et que l’on ne peut joindre), ne fait pas d’elle une connaissance légitimant la résolution : Les décisions de type bureaucratique ignorent en général la diversité des problématisations pouvant être considérées et ne sollicitent pas l’intelligence de la complexité du contexte perçu par les acteurs en situation.» 

Les lecteurs les plus assidus de ce blog ont pu constater que plusieurs de mes derniers billets proposent certaines modélisations du tutorat à distance et de son ingénierie et plus modestement du digital learning. D’autres sont consacrés au recours à l’intelligence artificielle et à ce que pourrait être une «cobotique tutorale». L’interpellation de Le Moigne m’amène donc à réfléchir à ma responsabilisation en tant que créateur de modèles et ce d’autant plus que l’accompagnement des apprenants à distance, devenant un thème d’actualité pressante au regard de la crise sanitaire de la Covid19, un plus grand nombre de personnes découvrent ce blog. 

Pour ma part, les leviers de la responsabilisation, je les puise dans une pratique réflexive de mes actions tant la métacognition est puissante à m'aider à déterminer qui j’ai été, ce que je suis et ce que je peux devenir. Il est vrai que, depuis plusieurs mois d’activité intense, tant la nécessité fait loi, et que cela s’est particulièrement révélé vrai durant ces périodes de confinement amenant un développement jamais vu de la formation à distance, j’ai peu accordé de temps à l’introspection. L’arrivée prochaine de la pause de fin d’année et les résolutions à prendre pour celle qui vient seront donc peut-être propices à ce temps de retour sur ma responsabilisation comme auteur du tutorat à distance. 

L’éditorial de Le Moigne m’a également interpellé sur l’usage de l’intelligence artificielle dans le tutorat à distance. Lors d’un récent webinaire, j’ai eu l’occasion de voir présenté, rapidement, un algorithme permettant de prédire les abandons d’apprenants engagés dans une formation à distance. Développé au sein de la communauté Moodle, il sera prochainement disponible et j’espère pouvoir bientôt le tester au sein d’un cours universitaire. Toutefois, il apparaît que les indicateurs choisis par les concepteurs de cet algorithme ne soient ni accessibles ni modifiables par l’enseignant-tuteur que je suis. Bien évidemment, je sais, pour connaître une des personnes ayant collaboré à la conception de cet algorithme, que les auteurs ne sont pas des ignorants des raisons multiples qui poussent un apprenant à distance à abandonner et que d’autre part, la prédiction ne pourra que s’améliorer selon les principes du big data et du machine learning, et qu’enfin, il ne s’agit pas de déresponsabiliser les tuteurs par la réalisation d’actions prédéterminées par la machine mais que ceux-ci resteront les juges des actions à mener envers les apprenants. 

Pour autant, l’absence de dialogue entre les concepteurs des algorithmes et les personnes qui sont sensées les utiliser, me semble significative d’une distance à parcourir. J’espère qu’elle le sera davantage que lorsqu’au début des années 2000, j’interpellais les éditeurs de LMS pour qu’ils instrumentent mieux le travail des tuteurs à distance, et lorsque, plus récemment, j'ai eu un début de dialogue, au point mort à l’heure actuelle, avec des spécialistes français d’xAPI afin d’expérimenter le potentiel de ce standard pour garder mémoire de la relation tutorale. 

En cette fin d’année, horribilis, et à l’aube de la nouvelle, la responsabilisation de chacun et plus particulièrement des modélisateurs, revêt une importance et une urgence certaines tant comme l’a constamment souligné Edgar Morin, tout au long de son œuvre et plus particulièrement dans « La connaissance de la connaissance » (Tome 3 de la Méthode) : «Toute connaissance acquise sur la connaissance devient un moyen de connaissance éclairant la connaissance qui a permis de l’acquérir».

mercredi 11 novembre 2020

Graphe de périmètre tutoral

Ce billet présente un outil graphique, pouvant être aisément réalisé sur un outil de dessin, permettant d'identifier sa pratique tutorale au regard des objectif tutoraux génériques poursuivis. 

Les objectifs tutoraux génériques (cf. Pratiques du tutorat à distance. Livret d'interventions) sont identifiés au croisement des fonctions tutorales et des plans de support à l’apprentissage. Ils sont au nombre de 28. 


Les tuteurs à distance, mais aussi les institutions qui les emploient, peuvent tirer un grand bénéfice à identifier les objectifs de soutien à l’apprentissage qui sont les leurs. Si chacun des objectifs tutoraux génériques a sa pertinence, il est bien rare que tous puissent être retenus dans le cadre d’un digital learning. Il s’agit donc de les prioriser et pour cela de procéder à certaines actions d’ingénierie tutorale (cf. L'ingénierie tutorale). Toutefois, il est fréquent que les institutions ne définissent que peu ou pas leur stratégie tutorale. Aussi, le graphe du « Périmètre tutoral » ci-dessous peut permettre de cartographier le positionnement du tuteur par rapport aux objectifs tutoraux et d'identifier le positionnement de l'institution vis à vis du tutorat à distance. 


Pour chaque plan de support à l’apprentissage (cognitif, socio-affectif, motivationnel et métacognitif), 7 objectif tutoraux génériques peuvent être investis. Il s’agit pour le tuteur à distance d’identifier, pour chacun, s’il fait l’objet, de sa part, d’interventions auprès des apprenants et ce qu’elles que soient les modalités retenues. Pour chaque plan de support à l’apprentissage, un indice est calculé de manière simple. Si par exemple, sur les 7 objectifs tutoraux génériques du plan de support cognitif, il est identifié des interventions tutorales effectives pour 5 d’entre eux, l’indice est de 5. En procédant de la sorte pour chaque plan de support à l’apprentissage, il est possible de tracer l’aire correspondant au périmètre d’interventions du tuteur.   

Exemple tiré de ma pratique dans l’UE Ingénierie tutorale du master MFEG de Rennes 1

Après avoir examiné mes pratiques, il apparaît que certains objectifs tutoraux génériques ne font pas l’objet d’interventions tutorales de ma part. 

Faire émerger les objectifs personnels de l’apprenant. Mon UE étant planifiée trois mois après le début du master, cet objectif n’est pas déterminant pour mon accompagnement dans la mesure où il a déjà fait l’objet d’interventions lors du recrutement et par les enseignants qui animent l’ouverture du master. 

Les objectifs tutoraux Aider à maîtriser l’environnement d’apprentissage - Susciter l’entraide technique entre apprenants - Encourager l’utilisation des outils ont également fait l’objet d’interventions auprès des étudiants en amont de la tenue de mon UE. 

Faire conscientiser ses préférences cognitives - Faire identifier les motivations intrinsèques - Aider à s’autoévaluer ne font généralement pas l’objet d’interventions de ma part même si cela peut arriver pour des étudiants rencontrant des difficultés spécifiques. 

Le tableau des objectifs tutoraux que j’investis s’établit donc ainsi :


5 objectifs tutoraux génériques du plan cognitif étant investis, son indice est de 5, de 6 pour le plan socio-affectif, de 4 sur le plan motivationnel et de 6 sur le plan métacognitif. 

Le graphe de mon périmètre tutoral est matérialisé par la zone en gris (la zone en pointillé indique le périmètre pouvant être investi pour des étudiants ayant des besoins plus spécifiques) : 



Usages du graphe de périmètre tutoral  

Comme indiqué ci-dessus, le graphe de périmètre tutoral peut être utilisé par les tuteurs à distance pour situer leurs pratiques. Dans ce cas, il a une fonction descriptive permettant la prise de recul réflexif. 

Il peut également être utilisé par les institutions pour définir une stratégie tutorale globale. 

Les concepteurs des dispositifs tutoraux peuvent aussi s’en servir pour prescrire les profils de tuteurs à distance.

Limite du graphe de périmètre tutoral

Il s'agit d'une représentation graphique essentiellement quantitative qui ne peut réellement remplacer la réalisation de deux des livrables de l'ingénierie tutorale, à savoir "le système tutoral" qui permet d'analyser et de prioriser les besoins de soutien des apprenants et de "l'audit tutoral" qui vise à évaluer le dispositif tutoral et à faire des préconisations pour l'améliorer. 

mardi 3 novembre 2020

10 conseils pour déconfiner à distance les apprenants

Le confinement, c’est la réduction des rencontres physiques mais ce ne peut être l’absence d’interactions sociales. En ce début de deuxième période de confinement (notez bien que je ne parle pas de seconde…) l’activité de formation est déportée à distance. Si lors du premier confinement, les acteurs de la formation ont mis à disposition de nombreuses ressources en ligne et réalisé une multitude de webinaires, souvent expositifs, le décrochage de nombreux apprenants a mis en lumière plusieurs vérités trop souvent oubliées : 

  • Il est impossible de reproduire à distance ce que l’on fait en présentiel sans risque de perte affectant directement l’atteinte des objectifs. Il faut donc faire différemment. 
  • La formation s’incarne dans la rencontre et l’échange entre personnes. 
  • Aucune ressource, quelle que soit sa qualité, ne peut remplacer la réflexion argumentée et la construction du sens qu’offre les échanges entre apprenants et formateurs. 
  • Tous les apprenants ne sont pas égaux face aux difficultés liées à la distance. 
  • L’autonomie de l’apprenant ne peut être érigée en préalable mais est à considérer un objectif à poursuivre. 
  • La distance oblige à rééquilibrer la proportion d’activités d’apports et de soutien à l’apprentissage. Il faut donc « enseigner moins pour qu’ils apprennent plus » 
C’est sur ce dernier point que je veux plus particulièrement attirer l’attention à travers 10 conseils pour déconfiner à distance les apprenants. 


Chaque apprenant confiné dispose de conditions matérielles et environnementales différentes. Pour ceux qui sont le plus dans l’inconfort, le risque de décrochage est accru. Il s’agit donc, à partir des éléments recueillis, de convenir avec chaque apprenant des aménagements de la formation lui permettant de poursuivre son apprentissage. 

Si les outils de communication sont nombreux, les préférences des formateurs pour tel ou tel ne doivent pas être imposées aux apprenants. Bien au contraire, il s’agit de rejoindre les apprenants dans leurs habitudes communicationnelles et de privilégier le ou les outils qui font consensus tant en termes de fonctionnalités que d’accessibilité par tous. 

La relation tutorale pour exister doit bien évidemment être une proposition faite aux apprenants sans ambiguïtés mais elle gagne à être contractualisée à travers une charte tutorale précisant les droits et les devoirs des formateurs et des apprenants entre eux. 

La littérature sur le tutorat à distance est abondante et les besoins de soutien des apprenants à distance sont largement décrits. Il est nécessaire de les contextualiser et de les prioriser au regard du public et du format de la formation puis de prévoir la manière dont il sera possible d’y répondre. Il s’agit donc de produire un scénario tutoral. 

Chaque apprenant apprend différemment et à un rythme qui lui est propre. Si le parcours de formation est forcément balisé et rythmé par les communications synchrones, il est souhaitable de laisser aux apprenants des possibilités de choix dans la planification de leurs activités. Et comme tous les apprenants ne sont pas égaux en matière d’habileté à planifier, il est utile de les aider dans cette tâche. 

« Faire circuler des signes de présence » constitue un levier puissant pour rompre l’isolement des apprenants et prévenir le décrochage. Aussi, tant pour donner des informations sur le déroulement de la formation, que pour manifester ses encouragements, soutenir la motivation, amener les apprenants à adopter une posture réflexive sur leurs stratégies d’apprentissage, le formateur doit communiquer de manière régulière et proactive. 

La réduction du temps entre la sollicitation d’un apprenant et la réponse du formateur se révèle souvent bénéfique. Aussi, sans exiger du formateur une disponibilité permanente, sa disponibilité doit être définie dans la charte tutorale et faire l’objet de rappels réguliers par le formateur. 

Les temps d’échanges et de mutualisation sont essentiels à la construction des connaissances. Si certains ont lieu directement entre apprenants dans des espaces où le formateur n’est pas présent, cela ne devrait pas l’exonérer d’en organiser de plus formels à certains moments remarquables de la formation tels que les retours sur des productions individuelles ou collaboratives. 

Une des activités les plus formatrices sont les commentaires du formateur sur les productions des apprenants. Que ceux-ci soient réalisés à l’occasion d’une classe virtuelle ou de manière plus personnalisée par écrit, ils gagnent à ne pas être uniquement négatifs ou positifs mais formulés dans un style constructif permettant la poursuite de l’apprentissage. 

Parce que la distance, a fortiori le confinement, n’est pas une condition naturelle, l’aménagement d’espace de prise de recul réflexive sur la manière de la vivre, de la réguler, de l’aménager se révèle un moyen efficace de lutter contre le décrochage.

lundi 28 septembre 2020

Parution du n°15 de la revue Tutorales


Après presque trois ans d’absence, la revue Tutorales revient enfin. 

L’idée de ce numéro est pourtant ancienne, et il a fallu attendre de longues années pour que l’occasion de le publier se fasse jour. Donner la possibilité, à des étudiants du master MFEG, ayant réalisé l’UE « Ingénierie tutorale », de témoigner de leurs pratiques, est un objectif que je me suis toujours fixé. 

Cette envie, constante, doit beaucoup à mes professeurs et tuteurs de la Téluq, qui au siècle dernier, m’avait sollicité, suite à une de mes productions dans un cours, pour rédiger mon premier article de revue traitant de la rétroaction. Je me souviens tout à la fois de la fierté mais aussi de mon appréhension à accepter, et surtout de l’enrichissement qui a été le mien en passant à la rédaction. Aussi, cette opportunité, je souhaitais, et continue à souhaiter, l’offrir aux étudiants des diplômes dans lesquels j’interviens. 

Pour passer de l’envie à la réalisation, deux conditions étaient nécessaires. D’une part, des livrables d’étudiants, servant à valider l’UE, de haute qualité, ce qui a été régulièrement le cas depuis 15 ans. D’autre part, une réelle volonté des étudiants concernés à remettre l’ouvrage sur le métier tant la rédaction d’un article à partir de ses travaux n’est pas toujours aisée. Lors de la promotion 2018-19, ces deux conditions ont été réunies et en voici le résultat. 

Celui-ci s’est vu retardé par l’ambition d’une écriture à multiples mains qui avaient travaillé sur deux livrables distincts de l’ingénierie tutorale, à savoir « le système tutoral » et « l’audit tutoral ». Cela a demandé du temps, de l’énergie et de la réflexion aux auteurs pour s’accorder sur une vision et un mode opératoire communs. Accorder, c’est bien le mot au regard de la métaphore choisie par les auteurs, que je vous laisse découvrir dans leur article… Plusieurs mois ont également été neutralisés par le confinement provoqué par la COVID19, dans la mesure où tous les auteurs sont des professionnels du digital learning et qu’ils ont particulièrement été sollicités en cette période de redécouverte de la formation à distance et que la rédaction et la publication se sont vues revêtir pour eux une urgence moindre. L’article « FaSiLa Tutorer ! » est dans la droite ligne des numéros déjà parus. Les auteurs sont avant tout des praticiens qui ont souhaité partager leurs méthodes. Nulle grande théorie d’exposée, mais des traces documentées des actions et des méthodes qui ont été les leurs, dans lesquelles, les futurs étudiants du MFEG, et tous ceux qui se frottent à la mise en place de dispositifs tutoraux dans des formations hybrides ou à distance, vont pouvoir trouver des sources d’inspiration. 

Ce numéro est complété par un entretien avec Anne-Cécile Franc qui a accueilli plusieurs auteurs à l’académie de Versailles et des témoignages de formatrices de l’ARIFTS qui a été un terrain d’actions pour d’autres. 

Il présente aussi le dodécagone d’analyse d’une ingénierie tutorale que j’ai proposé récemment.  

Si ce numéro est consacré à la conception des services tutoraux, je n’oublie pas que vous êtes très nombreux, surtout dans la période actuelle, à vous demander comment agir comme tuteur à distance. Aussi, il se fait l’écho de l’ouvrage que j’ai publié, juste avant le confinement, à l’intention des formateurs devant apprendre à devenir des tuteurs à distance. Chaque objectif tutoral générique, tirés de la matrice que j’ai publiée en 2012, y fait l’objet d’une description contenant des exemples d’interventions tutorales, susceptibles de le rendre opérationnel et atteignable. 

Je vous souhaite une lecture enrichissante de ce numéro 15 et n’ose pas m’avancer sur la date d’un hypothétique n°16…

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lundi 31 août 2020

Dodécagone d’analyse d’une ingénierie tutorale

S’il existe une manière optimale de réaliser une ingénierie tutorale, il faut bien reconnaître que la réalité des organisations qui y ont recours ne permet pas de la mettre toujours en place de manière exhaustive. Il n’existe donc pas une, mais des ingénieries tutorales, pour lesquelles j’ai précédemment proposé une typologie dont voici le schéma général (cf. Les différents types d’ingénierie tutorale).  


Il est intéressant et profitable pour l’ingénieur tutoral mais également pour les acteurs qui font appel à lui, d’analyser l’ingénierie tutorale à laquelle il a été procédé. Pour cela, il peut utiliser le « Dodécagone d’une ingénierie tutorale » où les douze actions permettant de produire les quatre livrables de l’ingénierie tutorale sont positionnées. 


Une échelle de quatre indicateurs sur le niveau de réalisation de chacune des actions permet de qualifier la pratique de l’ingénieur tutoral pour une formation donnée. Les indicateurs sont à préciser et, à titre d’exemple, leur définition peut être la suivante : 

  1. action non réalisée
  2. action réalisée minoritairement
  3. action réalisée majoritairement
  4. action entièrement réalisée. 

Exemple d’utilisation du dodécagone d’analyse d’une ingénierie tutorale 

Dans cet exemple, tiré d’une de mes expériences réelles d’ingénieur tutoral, sur une formation hybride d'une centaine d'heures réparties sur six mois, nous pouvons constater que la production des livrables de l’ingénierie tutorale a été partielle. 



















Le système tutoral n’a pas été très élaboré. En particulier l’analyse des besoins de soutien n’a été réalisée qu’à partir de la littérature et n’a pas fait l’objet d’enquête spécifique. De même, la priorisation des réponses tutorales n’a eu pour déterminant que le quantum horaire consacré au tutorat et s’est imposée d’elle-même en concentrant les interventions tutorales sur les réponses aux besoins de soutien les plus basiques. Les profils de tuteurs ont été identifiés théoriquement mais aucun rapprochement avec les fonctions des acteurs pressentis n'a réellement été négocié et établi.

Le scénario tutoral, qui était l'objectif unique du commanditaire a été réalisé entièrement. Les interventions tutorales retenues ont été positionnées au regard du scénario pédagogique et ont fait l'objet d'une description contenant des plans d'actions, des modèles de messages, des guides d'entretiens ou encore des conducteurs de classes virtuelles. Chacune des interventions tutorales a été quantifiée dans le respect du quantum horaire qui avait été défini par le commanditaire. Une charte tutorale a également été rédigée. 

Le plan de diffusion s’est limité à ne former qu’une partie des formateurs-tuteurs d'une part parce que le parcours de formation n’était que proposé et demandait une démarche volontaire de participation de la part des personnes concernées et que d'autre part, la publicité de cette formation est restée modeste. Par ailleurs, aucun outil de suivi de la relation tutorale n’a été mis en place, ce qui ne facilite pas la remontée d'informations sur la réalité de la diffusion des services tutoraux, ni une vision précise des tuteurs sur leurs actions ni encore la mutualisation de celles-ci entre tuteurs. Enfin, le dispositif tutoral n’a pas fait l’objet d’un réel modèle économique identifiant les coûts totaux du tutorat et les gains qui peuvent lui être attribués (cf. http://www.jrodet.fr/presROI/index.htm nécessite Flash). Seule la rémunération des tuteurs a été déterminée. 

A contrario, un audit tutoral a été entièrement réalisé à la suite des premières expérimentations de cette formation. Les préconisations qui en sont issues portaient essentiellement sur la nécessité d’analyser plus finement les besoins de soutien des apprenants, ce que l’audit a permis partiellement de faire, sur un allègement des contraintes de temps accordé aux tuteurs, sur des modalités d’accompagnement davantage synchrones et collectives, sur une meilleure définition des profils de tuteurs et de l’affectation des interventions tutorales à leur charge, sur un renforcement de la formation au tutorat des formateurs-tuteurs et autres tuteurs.

Dès lors, une réingénierie tutorale s’est révélée possible, demandant une nouvelle production ou actualisation de l’ensemble des livrables. 

Au final, l'ingénierie tutorale initiale s'est révélée être proche du type « Pragmatique ». 


Cet exemple nous montre, qu’en matière d’ingénierie tutorale, l’important est dans un premier temps de tenir compte des contraintes contextuelles, d’engager des premières actions permettant de répondre aux demandes expresses du commanditaire et de réaliser un audit tutoral afin d’enclencher un nouveau cycle permettant de se rapprocher d’une ingénierie tutorale « optimale ».

mercredi 19 août 2020

Typologie de digital learning : 6 graphes SDL de base

Un des usages du graphe SDL (Situer son Digital Learning), que j'ai indiqué dans le billet précédent de présentation de cet outil graphique, est de définir une typologie de digital learning. Par définition, une typologie est une réduction de la réalité et ne vise pas à faire écho à l'ensemble des possibles. Or en matière de design pédagogique, ces derniers sont innombrables et n'ont de réelles limites que celles des concepteurs.

J'ai choisi, ici, de présenter six graphes SDL de base. Deux pour les formations uniquement présentielles, deux pour des formations hybrides et deux pour des formations entièrement à distance. 



Le présentiel académique

La formation étant entièrement en présentiel, l'indice de la borne "Adapté au présentiel" est de 5. Dans une démarche académique, c'est l'approche transmissive qui est adoptée, aussi l'indice de la borne "Approche transmissive" est de 5. Le présentiel étant uniquement synchrone, l'indice de la borne "Adapté au synchrone" est de 5. L'approche transmissive favorisant le magistère du formateur et la non réelle prise en compte des connaissances préalables des apprenants, se caractérise également par un soutien à l'apprentissage faible d'où un indice de 2 pour la borne "Tutoré".


Le présentiel actif

La formation étant entièrement en présentiel, l'indice de la borne "Adapté au présentiel" est de 5. Le présentiel étant uniquement synchrone, l'indice de la borne "Adapté au synchrone" est de 5. La mise en activité des apprenants est revendiquée dans ce cas d'où un indice pour la borne "Approche active" de 5. Le présentiel étant uniquement synchrone, l'indice de la borne "Adapté au synchrone" est de 5. L'apprentissage en approche active fait fortement appel à la collaboration entre apprenants d'où un indice de la borne "Apprentissage collaboratif" à 4. Enfin, ces activités actives demandent au formateur d'intervenir en soutien des apprenants pour qu'ils les réalisent pleinement, ce qui entraîne un indice de la borne "Tutoré" à 4.


Hybride personnalisé

La formation présentant une succession de séquences présentielles et distancielles, l'indice du continuum "Adapté au présentiel > Adapté à la distance" se situe à 0. La personnalisation d'une formation nécessite la mise en place de parcours individuels d'où un indice de la borne "Apprentissage individuel" à 5. Cette personnalisation demande un haut niveau d'accompagnement, c'est pourquoi l'indice de la borne "Tutoré" est à 5. Cet accompagnement sera très souvent, mais pas systématiquement, réalisé en temps réel d'où un indice de la borne "Adapté au synchrone" à 4. Enfin, la personnalisation suppose une adaptation aux caractéristiques des apprenants qui entraîne l'adoption d'une démarche plus active que transmissive, bien que cette dernière puisse être adoptée pour les modules en ligne, d'où un indice de la borne "Approche active" à 3.

Hybride collaboratif

La formation présentant une succession de séquences présentielles et distancielles, l'indice du continuum "Adapté au présentiel > Adapté à la distance" se situe à 0. Basé essentiellement sur la collaboration des apprenants bien que certains apports puissent être étudiés individuellement, l'indice de la borne "Apprentissage collaboratif" est à 4. La collaboration s'incarnant dans des activités de production dont les sujets peuvent être tirés de l'environnement des apprenants, l'indice de la borne "Approche active" est à 4. Cette collaboration demandant un accompagnement des apprenants adapté mais non moins important, l'indice de la borne "Tutoré" est à 5. Enfin, si les activités collaboratives en asynchrone sont utiles, elles demandent des temps d'échanges synchrones d'où un indice de la borne "Adapté au synchrone" à 3.

Distanciel autonome

La formation se déroulant entièrement à distance, l'indice de la borne "Adapté au distanciel" est à 5. Le  recours à ce type de formation est souvent dicté par une recherche d'économie, en particulier sur l'accompagnement des apprenants, aussi l'indice de la borne "Tutoré" est à 1. Les apprenants étudient les ressources mises à disposition à leur rythme et à temps choisi d'où un indice de la borne "Adapté à l'asynchrone" à 5. Ceci amène aussi à positionner l'indice de la borne "Apprentissage individuel" à 5. L'apprentissage est réalisé essentiellement à partir de ressources qui favorisent une démarche descendante d'où un indice de la borne "Approche transmissive" à 4.


Distanciel collaboratif

La formation se déroulant entièrement à distance, l'indice de la borne "Adapté au distanciel" est à 5. L'intention collaborative étant clairement déclarée, l'indice de la borne "Apprentissage collaboratif" est à 5. Ceci suppose une approche active lors d'activités bien que certaines puissent être plus descendantes lors des apports d'où un indice de la borne "Approche active" à 3. La collaboration demande des temps d'échanges en temps réel des apprenants d'où un indice de la borne "Adapté au synchrone" à 4. De même, l'accompagnement des apprenants n'est pas à négliger, bien que ceux-ci s'apportent mutuellement de l'aide, d'où l'indice de la borne "Tutoré" à 4.

Les limites de ces graphes de base

Proposer une typologie nécessite de faire des choix dont la subjectivité* n'est pas absente. Je revendique celle-ci en prenant soin de ne pas tomber dans l'arbitraire, notamment en précisant les raisons qui m'ont fait retenir tel ou tel indice. Il m'a fallu également choisir le nombre de graphes de base. En me limitant à 6, deux par modalité présentielle, hybride et distancielle, j'ai fait le pari de la lisibilité au détriment de la variété. Ceci m'a amené, par exemple, à associer l'approche transmissive à un apprentissage individuel, et l'approche active à un apprentissage collaboratif, ce qui n'est pas toujours le cas. J'ai également plus souvent relié l'apprentissage asynchrone à une approche transmissive bien que certains modules puissent demander un engagement réel des apprenants. Il n'étonnera pas non plus aux lecteurs qui s'intéressent à mes publications, que le tutorat, à l'exception du "Présentiel académique" et du "Distanciel autonome" bénéficie d'indices souvent élevés. J'assume ce biais et réaffirme à cette occasion que l'accompagnement des apprenants est un des critères les plus importants à prendre en compte pour concevoir et diffuser des digital learning de qualité. 

Cette typologie de graphes SDL est maintenant entre vos mains et j'espère qu'elle vous sera utile malgré les limites que je viens d'exposer. Je ne doute pas que vous pouvez avoir des interprétations différentes de ces six propositions, aussi je vous encourage à vous saisir de SDL pour produire vos propres typologies. 

__________________

* Sur la subjectivité, cf. L'indispensable subjectivité de l'évaluation de François-Marie GERARD
http://animation.hepvs.ch/acm/images/stories/TM_au_CO/evaluation/subjectivite_evaluation.pdf

lundi 17 août 2020

Situer son dispositif de digital learning avec SDL

Pour interrompre cette pause estivale, une fois n'est pas coutume, ce billet ne traitera pas spécifiquement du tutorat à distance mais d'un outil dont l'idée m'est venue, repos aidant, et qui me semble utile pour situer un digital learning.



Depuis les débuts du e-learning, plusieurs typologies de dispositifs ont été proposées. La plus ancienne (début du XXIe siècle) et la plus connue est COMPETICE. Elle propose cinq scénarios sur un continuum allant de l’absence d’activités distancielles jusqu’à une quasi absence ou absence d’activités présentielles. De manière plus récente, la typologie HySUP (2009-2012) a défini six scénarios (trois centrés sur l’enseignement et trois sur l’apprentissage) à partir de cinq dimensions : i) la mise à distance et les modalités d’articulation des phases présentielles et distantes, ii) l’accompagnement humain, iii) les formes particulières de médiatisation et iv) de médiations liées à l’utilisation d’un environnement techno-pédagogique et, enfin, v) le degré d’ouverture du dispositif (cf. Daniel Peraya, Bernadette Charlier, Nathalie Deschryver (2014). Une première approche de l’hybridation). Ces dimensions sont elles-mêmes subdivisées en 14 composantes. Ces typologies sont très utiles tant pour prescrire ce que doit être un dispositif en gestation que pour décrire des digital learning existants. 

COMPETICE est une production proposée par le Ministère de l'éducation nationale aux professionnels de l'éducation. HySUP est issue d’une large collaboration d’universitaires belges, français, luxembourgeois et suisses. Toutefois, COMPETICE ne s’intéresse qu’à l’association des activités présentielles et distancielles, ce qui peut être insuffisant tandis qu’HySUP s’appuie sur une méthodologie rigoureuse mais lourde à mettre en place. 

Aussi, il m’a paru intéressant de proposer une alternative se situant à mi-chemin de ces deux typologies. SDL (Situer son Digital Learning) est un outil graphique, facilement réalisable sur un outil de dessin, qui permet de situer un digital learning sur cinq continuums : 
  1. Adapté au présentiel > Adapté à la distance 
  2. Apprentissage individuel > Apprentissage collaboratif 
  3. Approche transmissive > Approche active 
  4. Adapté au synchrone > Adapté à l’asynchrone 
  5. Tutoré > Autoportant



Chacune des bornes de ces continuums est définie ainsi : 

Adapté au présentiel : Dispositif nécessitant des séquences présentielles pour la réalisation d’activités ne pouvant pas être réalisées à distance. 
Adapté à la distance : Dispositif dont toutes les activités ou une part très majoritaire d’entre elles peuvent être réalisées à distance. 
Apprentissage individuel : Dispositif ne proposant pas d’activités à réaliser en groupe et où l’évaluation des apprenants est strictement individuelle. 
Apprentissage collaboratif : Dispositif proposant des activités à réaliser en groupe et sous-groupes dont les résultats sont pris en compte dans l’évaluation des apprenants. 
Approche transmissive : les apports sont réalisés de manière descendante, que ce soit par l’intermédiaire d’exposés en présentiel ou classe virtuelle, ou à travers la visualisation de ressources médiatiques, peu voire non interactives, telles que des vidéos. 
Approche active : Les apprenants construisent leurs connaissances à partir de celles qu’ils ont déjà et l’exploitation d’apports pour réaliser des productions leur permettant de situer leurs compétences.
Adapté au synchrone : Dispositif intégrant des séquences distancielles synchrones telles que la classe virtuelle, la conférence téléphonique, le chat et des outils d’interactions en temps réel. 
Adapté à l’asynchrone : Dispositif proposant des activités à partir de ressources telles que des modules d’apport de connaissances, des quiz, des activités à réaliser en autonomie par les apprenants. 
Tutoré : Dispositif offrant aux apprenants un accompagnement dont les objectifs sont définis et ont fait l’objet d’une ingénierie tutorale. 
Autoportant : Dispositif se suffisant à lui-même, où l’apprenant, en l’absence de toute intervention humaine durant sa diffusion, réalise isolément les activités. 

Pour prescrire ou décrire un digital learning, il est affecté un indice de 0 à 5 à l’une des bornes de chaque continuum. Ainsi, un dispositif uniquement présentiel se voit affecté un indice 5 sur la borne « Adapté au présentiel » du continuum « Adapté au présentiel > Adapté à la distance ». 0 indique un désaccord complet avec la définition de chaque borne et 5 un accord entier. Les indices 1, 2, 3 et 4 ne sont pas définis de manière précise et sont à choisir en fonction du désaccord ou de l’accord avec l’une des bornes de chaque continuum. Il est certain, que l’utilisateur de SDL peut trouver avantage à les définir de manière plus précise. A titre d’exemple cela peut être : 0 : désaccord complet ; 1 : désaccord fort ; 2 : Désaccord majoritaire ; 3 : Accord majoritaire ; 4 : Accord fort ; 5 : Accord complet. 

L’absence de point neutre est voulue car que ce soit pour concevoir ou pour diagnostiquer, il s’agit avant tout d’effectuer des choix et qu’une échelle d’indicateurs paire force à choisir. 

Un exemple 

Cette formation de 40 heures est entièrement réalisée à distance. Elle est structurée en plusieurs séminaires démarrant tous par une classe virtuelle suivie d’une étude de modules en ligne, puis la production collaborative d’un livrable et enfin une classe virtuelle de mutualisation et de retours sur les livrables. En amont du premier séminaire, une classe virtuelle d’accueil est positionnée et la formation se termine par une classe virtuelle de clôture. Les apprenants sont accompagnés par plusieurs tuteurs sur les séminaires dont ils sont experts du contenu. Les interventions tutorales, individuelles et collectives, sont réalisées de manière asynchrone par mail et de manière synchrone lors des classes virtuelles. Elles font l’objet d’une capitalisation permettant d’enrichir le scénario tutoral d’une session à l’autre.


Le graphe SDL obtenu est le suivant : 


Quelques utilisations possibles

Dans une démarche prescriptive, SDL peut permettre aux initiateurs de digital learning de clarifier leurs intentions et aux concepteurs de vérifier que leurs productions répondent bien aux demandes des commanditaires. 

SDL peut également être utilisé comme outil de diagnostic d'un ensemble de digital learning constituant l'offre d'un organisme de formation afin de vérifier que la réalité de celle-ci est en cohérence avec le discours commercial qui l'accompagne. 

Enfin, SDL peut servir à proposer une typologie de digital learning ayant pour but de faciliter la conception pédagogique et tutorale de formations.

dimanche 12 juillet 2020

Bricolage et ingénierie, les deux mamelles du tutorat à distance



Le bricolage et l’ingénierie sont deux figures, deux approches, deux démarches que parait tout opposer. Ici, où l’aptitude serait développée par le faire, elle serait, là, initiée par l’organisation et la modélisation. Ici, l’induction, là, la déduction.

Dans le digital learning, les institutions contraignent souvent les individus promus tuteurs à distance à s’adapter subito, à faire preuve de créativité, à transférer à la situation distancielle, leurs pratiques présentielles de l’accompagnement, bref à bricoler. Puis, dans le meilleur des cas, à tirer progressivement de leurs expériences sinon des modèles, du moins un savoir-faire repéré et énonçable.

Depuis une quinzaine d’années, j’ai avancé l’idée d’ingénierie tutorale en soulignant qu’il n’était ni raisonnable ni responsable pour les institutions de transférer entièrement la responsabilité de la qualité des services tutoraux aux seuls tuteurs à distance. Cette démarche d’ingénierie, pour ceux qui la découvrent, relève bien de la démarche déductive. Ainsi, les étudiants auprès desquels j’interviens dans le master MFEG de Rennes 1, le plus souvent sans expérience de l’accompagnement des apprenants à distance, sont d’abord amenés à prendre connaissance des méthodes, livrables et actions de l’ingénierie tutorale avant de les mettre en pratique. Or, mes propositions ne sont que le résultat de ma pratique de tuteur à distance et de consultant, soit une mise à distance réflexive de nature inductive.

Lors des formations de tuteurs à distance que j’anime, si une part importante est donnée à la pratique et qu’elles sont bâties sur le principe de l’isomorphisme entre les situations vécues comme apprenant et celles que les apprenants auront comme tuteurs à distance, c’est bien une démarche déductive qui est le plus souvent favorisée car se révélant plus adaptée aux contraintes de temps et de coûts imposées par les donneurs d’ordre.

La pensée complexe, et avant elle la dialectique, nous enseignent que les pôles contraires se servent l’un l’autre, plus, ne peuvent exister en l’absence d’un seul. Bricolage et ingénierie sont donc à considérer comme un couple indissociable et nécessaire. Ce sont les allers-retours de l’individu, de l’un à l’autre, à force de boucles rétroactives, qui lui permettent de dépasser les limites de l’ingénierie et du bricolage et de nourrir ce que d'aucuns nomment l'expertise. Il faut à l’individu, à la fois et successivement, successivement et à la fois, vouloir, pouvoir et savoir parcourir le chemin spiralé du modèle à l’improvisation et de l’improvisation au modèle. Se nourrir à chacune des mamelles du tutorat à distance pour grandir et devenir un tuteur à distance expérimenté.

Le bricolage tutoral
Bricoler, c’est refuser l’application stricte d’un modèle, aussi performant qu’il puisse paraître. C’est savoir prendre la situation réelle pour ce qu’elle est et non pour sa description. Le seul Maître du bricolage est la situation. Pour ce faire, le tuteur à distance doit être capable de flexibilité, de discernement et de ce tour de main qui n’est pas transférable, même s’il peut être observé, comme Michel de Certeau l’a fait pour les gestes du quotidien.

Bricoler le tutorat, c’est alors identifier les tâches de soutien à réaliser à destination de l’apprenant et choisir les moyens permettant de s’en acquitter, cela sans suivre une procédure établie mais faire avec les « moyens du bord ». Ce compromis entre l’intention et les moyens disponibles font que le résultat de l’intervention tutorale est forcément décalé. Décalage que l’on retrouve dans toute communication, et tutorer à distance est toujours une action de communication, entre ce que je pense, ce que je dis, ce qui est entendu, ce qui est compris, ce qui est utilisé par mon interlocuteur. Dans « La pensée sauvage » Lévi-Strauss a cette formule éclairante : « Une fois réalisé celui-ci [ici le résultat de l’intervention tutorale] sera donc inévitablement décalé par rapport à l’intention initiale (d’ailleurs simple schème), effet que les surréalistes ont nommé avec bonheur « hasard objectif ». Aussi, les interventions tutorales seraient à réaliser sans les subordonner aux effets qui en sont attendus afin d’ouvrir un espace relationnel entre le tuteur et l’apprenant, où le fortuit et la poésie qui est sienne puisse s’épanouir et être agissante.

Bricoler le tutorat serait mettre l’accent sur la relation à établir avec l’apprenant, ouvrir des possibles, pratiquer l’écoute active, s’autoriser la spontanéité, mais également faire avec les moyens contingents, recourir à la guidance, conseiller, réfléchir son action. Naviguer entre ces pôles que sont la relation tutorale et les interventions tutorales, c’est pour le tuteur à distance s’offrir l’opportunité de l’expérience et du savoir pratique.

Si donc, savoir bricoler est indispensable au tuteur à distance, est-ce pour autant suffisant pour que le tutorat à distance soit une réalité dans les dispositifs de digital learning ?

L’ingénierie tutorale
Le tutorat à distance étant reconnu comme un élément déterminant de la qualité d’un digital learning, il ne peut être ignoré par les concepteurs et laissé à la seule pratique des tuteurs. Tout comme l’animation d’une formation présentielle est encadrée par une ingénierie pédagogique, les services tutoraux et les pratiques des tuteurs à distance gagnent à l’être par les résultats d’une ingénierie tutorale. Il s’agit de définir, de concevoir, de préparer la diffusion et d’évaluer les services d’accompagnement des apprenants d’un digital learning.

Les enjeux pour l’institution sont de déterminer une politique d’accompagnement fondée sur des valeurs dans lesquelles elle se reconnaît, d’identifier les moyens à mettre en œuvre au service de cette politique, de construire le modèle économique assurant la viabilité du dispositif tutoral. Cela nécessite d’identifier les besoins de soutien les plus courants des apprenants à distance, de les prioriser afin de ne formuler des réponses qu’à ceux dont l’atteinte est estimée supportable au regard des contraintes contextuelles, de relier ces interventions tutorales aux différents profils de tuteurs. Afin de pouvoir répondre à davantage de besoins de soutien et d’offrir un accompagnement plus complet, il est primordial de faciliter la tâche des tuteurs en décrivant et quantifiant leurs interventions. Ceci est également nécessaire afin d’assurer une harmonisation minimale des services tutoraux rendus aux apprenants lorsqu’une institution emploie plusieurs tuteurs pour différentes sessions d’une même formation. Dès lors, il s’agit pour l’institution d’organiser la montée en compétences des tuteurs à distance en les formant et en initiant des communautés de pratiques destinées à la mutualisation des interventions tutorales réalisées. Le dimensionnement d’outils de suivi de la relation tutorale, et des interventions tutorales effectuées, est essentiel lorsque le nombre d’apprenants accompagnés par un tuteur excède sa capacité de mémorisation. Ce n’est qu’à cette condition qu’une réelle personnalisation de l’accompagnement peut être envisagée. La mise en place d’une évaluation des services tutoraux qui peut prendre la forme d’un audit auprès des responsables de formation, des formateurs-tuteurs et des apprenants amène ainsi l’institution à s’engager dans un processus d’amélioration continue de l’accompagnement des apprenants à distance.

Parce que le tuteur à distance intervient toujours dans le cadre formel d’une formation voulue par une institution, il ne peut se contenter de bricoler son accompagnement de manière isolée et sans avoir à en justifier. Mais alors, comment associer bricolage et ingénierie ?

Associer bricolage et ingénierie
Associer le bricolage des tuteurs à distance et l’ingénierie tutorale paraît difficile au premier abord tant les points de départ et les ressorts d’action de l’un et de l’autre sont éloignés. Là ou le bricoleur met l’accent sur la relation avec l’apprenant en situation, l’ingénierie tutorale prétend modéliser l’accompagnement, du moins lui fixer un cadre conçu par avance.

Il existe pourtant des leviers permettant d’articuler ces pôles contraires dont voici les principaux.

Construire un vocabulaire et une culture partagée du tutorat à distance. L’élaboration d’un vocabulaire spécifique au tutorat à distance mais également des échanges entre l’institution et les tuteurs sur les valeurs accordées au tutorat est certainement une des premières actions à mener. Elle permet aux acteurs de se reconnaître, d’identifier leurs différences de représentations, de construire leurs convergences.

Dimensionner les conditions et les moyens de la délivrance des services tutoraux. Si les contraintes contextuelles pèsent sur les résultats de l’ingénierie tutorale, il est néanmoins prudent de ménager des marges de liberté et d’initiative aux tuteurs dans l’adaptation de leur accompagnement aux situations réelles des apprenants. Afin que le bricolage tutoral puisse être pratiqué, un espace, au périmètre énoncé, devra être prévu lors de l’ingénierie tutorale. Il sera alors nécessaire de lui donner une dimension contractuelle par la rédaction de deux chartes tutorales, l'une définissant les droits et devoirs des tuteurs envers l’institution et inversement et l'autre concernant les tuteurs et les apprenants.

Associer les tuteurs à la conception des dispositifs tutoraux. Afin de diminuer les préconisations de l’ingénierie tutorale que l’expérience réelle de l’accompagnement des apprenants invalidera, il est utile d’associer des tuteurs à la définition du scénario tutoral. De même, des espaces d’échanges, en présence et à distance, entre concepteurs et tuteurs devraient être aménagés durant la diffusion de la formation, en particulier lors de la première session de la formation, afin que les tuteurs puissent faire remonter les difficultés des apprenants sur tel ou tel aspect du contenu ou du matériel pédagogique et suggérer des modifications.

Expérimenter et partager les expériences. Un dispositif tutoral conçu n’est qu’une élaboration intellectuelle qui ne peut s’exonérer d’être passer au crible de l’action réelle. Il est donc nécessaire de procéder à des expérimentations et surtout d’organiser des retours d’expérience afin de relever les manques, les inadaptations, le superflu des résultats de l’ingénierie tutorale que seul l’exercice du tutorat à distance permet de révéler.

Mutualiser le bricolage pour le conceptualiser. Les praticiens de la didactique professionnelle en témoignent fréquemment, les professionnels ont beaucoup de difficultés à décrire leur savoir-faire pratique, les raisonnements qui les amènent à telle ou telle comportement, l’enchaînement de leurs actions. Il en est de même pour les tuteurs à distance. Ce n’est pourtant qu’à cette condition que des lignes de force peuvent émerger et aboutir à enrichir la modélisation des interventions tutorales. Il serait donc intéressant que des didacticiens, des psychologues et des ergonomes interviennent auprès de groupes de tuteurs à distance pour fournir de nouveaux éléments à ceux qui sont chargés de l’ingénierie tutorale.

Il est évident que ce billet est très loin d’épuiser le sujet du dépassement des postures des tuteurs bricoleurs et des ingénieurs du tutorat à distance. Aussi, n’hésitez pas à l’enrichir par vos réactions et commentaires.

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Sources

De Certeau, Michel. L'invention du quotidien. Gallimard. 1980.

Levi-Srauss, Claude. La pensée sauvage. Plon. 1962.

Morin, Edgar. La méthode. Le Seuil. 1977-2004.

Paul, Maela. La démarche d'accompagnement. De Boeck. 2020.

Pastré, Pierre. La didactique professionnelle. PUF. 2011.

Rodet, Jacques. L'ingénierie tutorale. JIP Editions. 2016.

samedi 25 avril 2020

3 outils au service des tuteurs à distance

Je vous propose un court module réalisé sur Rise d'Articulate autour de trois outils utiles aux tuteurs à distance et formateurs : le journal de formation, la carte d'empathie et le sociogramme.

https://cutt.ly/syv3Eq1

mardi 21 avril 2020

Pistes pour une cobotique tutorale

La cobotique est l'association de l'humain et de l'intelligence artificielle et autres outils techniques pour la réalisation d'un produit ou d'un service. Dans ce billet, je tente de dresser quelques pistes sur ce que pourrait être une cobotique tutorale.

Les conditions de l’action tutorale

L’action des tuteurs à distance, comme tout autre action, est conditionnée par le vouloir, le savoir et le pouvoir faire. Si le « vouloir faire » est celui de l’individu en charge du tutorat, il est aussi dépendant de celui de son organisation qui dimensionne les moyens nécessaires de son « pouvoir faire ». De même, le « savoir faire » du tuteur dépend tout à la fois de son vouloir se former et se perfectionner et du vouloir de son organisation à lui en faciliter la possibilité. Savoir, vouloir et pouvoir sont indissociables. Ils se conditionnent et se nourrissent les uns les autres. Ils sont interdépendants. Lorsque que l’un manque, l’action n’existe pas.



Lorsque le tuteur peut et sait réaliser les interventions de support aux apprenants mais qu’il ne veut pas le faire, et ses raisons peuvent être nombreuses et variées pour adopter une telle attitude, l’action tutorale est avortée. Il apparait donc que les organisations doivent se préoccuper du vouloir des tuteurs, ne serait-ce qu’en adoptant des mesures incitatives et plus notablement en s’obligeant à la mise en place d’un plan de conduite de changement.

Lorsque le tuteur sait et veut faire mais qu’il ne peut pas faire, l’action tutorale est tout simplement impossible. Pouvoir faire dépend des moyens mis à la disposition du tuteur, temps, rémunération, moyens et outils techniques, légitimation. C’est bien à l’organisation dont le tuteur dépend de dimensionner ces moyens.

Lorsque le tuteur peut et veut faire mais ne sait pas faire, l’action tutorale est inefficace voire peut se révéler contre-productive. Le savoir lié à l’activité tutorale s’apprend et il est toujours aventureux de penser qu’un formateur présentiel deviendra un tuteur à distance efficace par le seul fait de le décider tant le changement de posture de transmetteur à facilitateur et l’adaptation aux conditions de la distance nécessitent un apprentissage et la construction d’un savoir devenir.

Les limites du tutorat humain

Dans l’idéal, le tuteur sait, veut et peut réaliser les interventions de support auprès des apprenants. Pour autant, même dans cette situation, le tutorat humain se heurte à certaines limites.

Tout d’abord, un tuteur à distance qui est avant tout un pédagogue peut être rebuté par certaines tâches et donc ne pas vouloir les réaliser. C’est le cas des tâches administratives répétitives, la transmission de notifications des modifications de la formation tels que des ajouts de ressources, des contributions sur forum ou encore d’être contraint à répéter les mêmes réponses aux questions les plus fréquentes des apprenants. Notons que pour toutes ces tâches, la plus-value de l’humain est assez limitée, voire inexistante, alors même que les bénéfices que peuvent en tirer les apprenants sont loin d’être négligeables.

Le tuteur humain, même celui qui est doté de tous les moyens nécessaires à son action ne peut pas tout faire. Il ne peut pas être disponible 24 heures sur 24. Il ne peut pas enrichir en continu des tableaux de bord pour chaque apprenant et pour le groupe. Il ne peut pas reconstituer en temps réel l’historique de la relation tutorale qu’il entretient avec chaque apprenant dès lors que le nombre d’apprenants se compte en dizaines.

Le savoir d’un tuteur à distance, y compris pour le plus expérimenté, reste limité par les possibilités humaines, en particulier celles relevant de l’intelligence logico-mathématique pour laquelle les machines sont désormais bien plus performantes. Ainsi, l’analyse approfondie des traces des apprenants, la détection des signaux faibles de démotivation ou la constitution de tableaux de bord permettant d’avoir un état d’avancement de chacun des apprenants, se révèlent soit hors de portée d’un tuteur humain soit lui demande un temps dont il ne dispose généralement pas.

Là où l’action du tuteur humain ne peut exister du fait de son manque de « vouloir faire », de « pouvoir faire » ou de « savoir faire » il serait opportun qu’une aide technologique prenne le relais. Cette cobotique, collaboration entre l’humain et les outils, voit aujourd’hui son champ s’élargir par le développement des fonctionnalités des plateformes de e-learning et davantage pas les possibilités de l’intelligence artificielle.

Dans le tableau ci-dessous sont récapitulées les limites du tuteur humain tant sur son « vouloir », son « pouvoir » et son savoir » et indiqué les solutions technologiques qui pourraient y suppléer.



Les effets possibles de la cobotique tutorale

Bien évidemment, le tableau ci-dessus se limite à identifier les technologies pouvant suppléer le tuteur humain et ne décrit pas comment elles pourraient le faire. Ceci relève davantage de l’expertise des éditeurs de plateforme et surtout des acteurs de l’intelligence artificielle appliquée à la formation. N’étant ni l’un, ni l’autre, je me limite à inviter ceux-ci à se saisir de la question tutorale.

Imaginons que la cobotique tutorale soit une réalité… Les organisations qui la mettront en place seront alors face à un choix stratégique : engranger les bénéfices offerts par les plateformes et l’IA en réduisant le temps de tutorat humain à proportion des tâches tutorales assumées par ces outils ou bien réaffecter, aux tuteurs humains, le temps de tutorat économisé afin qu’ils puissent investir d’autres plans de support à l’apprentissage (motivationnel, socio-affectif et métacognitif) qui sont plus souvent négligés et répondre ainsi à davantage de besoins de soutien des apprenants.

Espérons que ce soit ce dernier choix qui soit réalisé, tant les apprenants à distance méritent un accompagnement de haute qualité. 

mardi 7 avril 2020

Mon Interview en podcast par Marco Bertolini

Un grand merci à Marco Bertolini pour l'organisation de cet interview et la mise en ligne du podcast sur le site Formation 3.0 

samedi 4 avril 2020

L'accompagnement des apprenants à l'heure du confinement

Voici deux ressources qui donnent des clés pour accompagner les apprenants en cette période de confinement.

Table ronde : L’accompagnement des apprenants, le secret de la réussite

Les 6 points clés de l’accompagnement :

  • Donner une vision d’ensemble du dispositif ;
  • Aider à planifier ;
  • Aider à doser et fournir un effort soutenable ;
  • Donner des signes de présence ;
  • Miser sur la collaboration pour lutter contre l’isolement et l’abandon ;
  • Ne pas oublier le plaisir.

https://il-di.com/episode-02-accompagnement/


Interview en podcast

Dans cet interview, j'aborde les points suivants :

  • La place incontournable du tutorat à distance dans les dispositifs d’enseignement et d’accompagnement
  • A quelles conditions le tutorat à distance livre des effets positifs
  • Comment mobiliser l’autonomie et la responsabilisation de l’apprenant à distance


https://soundcloud.com/user-633391394/interview-jacques-rodet

mercredi 4 mars 2020

Web-rencontre autour du livre "Pratiques du tutorat à distance"

Bonjour à chacune et chacun,

Les contacts que j’ai eus avec les premiers lecteurs de « Pratiques du tutorat. Livret d’interventions » m’incitent à vous proposer une web-rencontre en classe virtuelle autour de ce livre. Elle sera l’occasion d’échanger librement tant sur le contenu du livre que sur vos questions relatives au tutorat à distance.


Inscription nécessaire à https://forms.gle/NnhLjvjEXUvYU23d8