lundi 17 août 2020

Situer son dispositif de digital learning avec SDL

Pour interrompre cette pause estivale, une fois n'est pas coutume, ce billet ne traitera pas spécifiquement du tutorat à distance mais d'un outil dont l'idée m'est venue, repos aidant, et qui me semble utile pour situer un digital learning.



Depuis les débuts du e-learning, plusieurs typologies de dispositifs ont été proposées. La plus ancienne (début du XXIe siècle) et la plus connue est COMPETICE. Elle propose cinq scénarios sur un continuum allant de l’absence d’activités distancielles jusqu’à une quasi absence ou absence d’activités présentielles. De manière plus récente, la typologie HySUP (2009-2012) a défini six scénarios (trois centrés sur l’enseignement et trois sur l’apprentissage) à partir de cinq dimensions : i) la mise à distance et les modalités d’articulation des phases présentielles et distantes, ii) l’accompagnement humain, iii) les formes particulières de médiatisation et iv) de médiations liées à l’utilisation d’un environnement techno-pédagogique et, enfin, v) le degré d’ouverture du dispositif (cf. Daniel Peraya, Bernadette Charlier, Nathalie Deschryver (2014). Une première approche de l’hybridation). Ces dimensions sont elles-mêmes subdivisées en 14 composantes. Ces typologies sont très utiles tant pour prescrire ce que doit être un dispositif en gestation que pour décrire des digital learning existants. 

COMPETICE est une production proposée par le Ministère de l'éducation nationale aux professionnels de l'éducation. HySUP est issue d’une large collaboration d’universitaires belges, français, luxembourgeois et suisses. Toutefois, COMPETICE ne s’intéresse qu’à l’association des activités présentielles et distancielles, ce qui peut être insuffisant tandis qu’HySUP s’appuie sur une méthodologie rigoureuse mais lourde à mettre en place. 

Aussi, il m’a paru intéressant de proposer une alternative se situant à mi-chemin de ces deux typologies. SDL (Situer son Digital Learning) est un outil graphique, facilement réalisable sur un outil de dessin, qui permet de situer un digital learning sur cinq continuums : 
  1. Adapté au présentiel > Adapté à la distance 
  2. Apprentissage individuel > Apprentissage collaboratif 
  3. Approche transmissive > Approche active 
  4. Adapté au synchrone > Adapté à l’asynchrone 
  5. Tutoré > Autoportant



Chacune des bornes de ces continuums est définie ainsi : 

Adapté au présentiel : Dispositif nécessitant des séquences présentielles pour la réalisation d’activités ne pouvant pas être réalisées à distance. 
Adapté à la distance : Dispositif dont toutes les activités ou une part très majoritaire d’entre elles peuvent être réalisées à distance. 
Apprentissage individuel : Dispositif ne proposant pas d’activités à réaliser en groupe et où l’évaluation des apprenants est strictement individuelle. 
Apprentissage collaboratif : Dispositif proposant des activités à réaliser en groupe et sous-groupes dont les résultats sont pris en compte dans l’évaluation des apprenants. 
Approche transmissive : les apports sont réalisés de manière descendante, que ce soit par l’intermédiaire d’exposés en présentiel ou classe virtuelle, ou à travers la visualisation de ressources médiatiques, peu voire non interactives, telles que des vidéos. 
Approche active : Les apprenants construisent leurs connaissances à partir de celles qu’ils ont déjà et l’exploitation d’apports pour réaliser des productions leur permettant de situer leurs compétences.
Adapté au synchrone : Dispositif intégrant des séquences distancielles synchrones telles que la classe virtuelle, la conférence téléphonique, le chat et des outils d’interactions en temps réel. 
Adapté à l’asynchrone : Dispositif proposant des activités à partir de ressources telles que des modules d’apport de connaissances, des quiz, des activités à réaliser en autonomie par les apprenants. 
Tutoré : Dispositif offrant aux apprenants un accompagnement dont les objectifs sont définis et ont fait l’objet d’une ingénierie tutorale. 
Autoportant : Dispositif se suffisant à lui-même, où l’apprenant, en l’absence de toute intervention humaine durant sa diffusion, réalise isolément les activités. 

Pour prescrire ou décrire un digital learning, il est affecté un indice de 0 à 5 à l’une des bornes de chaque continuum. Ainsi, un dispositif uniquement présentiel se voit affecté un indice 5 sur la borne « Adapté au présentiel » du continuum « Adapté au présentiel > Adapté à la distance ». 0 indique un désaccord complet avec la définition de chaque borne et 5 un accord entier. Les indices 1, 2, 3 et 4 ne sont pas définis de manière précise et sont à choisir en fonction du désaccord ou de l’accord avec l’une des bornes de chaque continuum. Il est certain, que l’utilisateur de SDL peut trouver avantage à les définir de manière plus précise. A titre d’exemple cela peut être : 0 : désaccord complet ; 1 : désaccord fort ; 2 : Désaccord majoritaire ; 3 : Accord majoritaire ; 4 : Accord fort ; 5 : Accord complet. 

L’absence de point neutre est voulue car que ce soit pour concevoir ou pour diagnostiquer, il s’agit avant tout d’effectuer des choix et qu’une échelle d’indicateurs paire force à choisir. 

Un exemple 

Cette formation de 40 heures est entièrement réalisée à distance. Elle est structurée en plusieurs séminaires démarrant tous par une classe virtuelle suivie d’une étude de modules en ligne, puis la production collaborative d’un livrable et enfin une classe virtuelle de mutualisation et de retours sur les livrables. En amont du premier séminaire, une classe virtuelle d’accueil est positionnée et la formation se termine par une classe virtuelle de clôture. Les apprenants sont accompagnés par plusieurs tuteurs sur les séminaires dont ils sont experts du contenu. Les interventions tutorales, individuelles et collectives, sont réalisées de manière asynchrone par mail et de manière synchrone lors des classes virtuelles. Elles font l’objet d’une capitalisation permettant d’enrichir le scénario tutoral d’une session à l’autre.


Le graphe SDL obtenu est le suivant : 


Quelques utilisations possibles

Dans une démarche prescriptive, SDL peut permettre aux initiateurs de digital learning de clarifier leurs intentions et aux concepteurs de vérifier que leurs productions répondent bien aux demandes des commanditaires. 

SDL peut également être utilisé comme outil de diagnostic d'un ensemble de digital learning constituant l'offre d'un organisme de formation afin de vérifier que la réalité de celle-ci est en cohérence avec le discours commercial qui l'accompagne. 

Enfin, SDL peut servir à proposer une typologie de digital learning ayant pour but de faciliter la conception pédagogique et tutorale de formations.

6 commentaires:

Moiraud Jean-Paul a dit…

Merci Jacques

Philippe Ramette a dit…

Coup de genie Jacques bonne fin de vacances

Lisette Cazellet a dit…

merci pour cette excellente présentation, claire et utile pour analyser des dispositifs de formation en ligne
Lisette Cazellet Association FORMATICSanté

Arnaud K a dit…

Intéressant !

Francoise Docq a dit…

Bonjour Jacques.

Je m'interroge sur le choix du mot "adapté" dans votre modèle (adapté à la distance, adapté au synchrone...). L'idée exprimée n'est-elle pas plutôt
- le dispositif requiert une disponibilité synchrone (versus il est entièrement organisé en asynchrone),
- il requiert des regroupements en présentiel (versus il est entièrement organisé à distance) ?

Ainsi, dans votre exemple, l'axe synchrone-asynchrone ne serait pas exprimé par un zéro (ce qui, si on s'en tient à l'aspect visuel du graphe, ne donne pas d'information sur cet axe = absence d'information visuelle) mais par un indice 3 (par exemple...) du côté du synchrone et 3 du côté de l'asynchrone. Visuellement, le graphe exprimerait alors que ces deux modalités sont rencontrées dans le dispositif.

Qu'en pensez-vous ?

Jacques Rodet a dit…

Bonjour Françoise,
Oui, on peut très bien utiliser le modèle comme vous le décrivez.