Le plan métacognitif est certainement celui qui est le moins bien perçu, que ce soit par les tuteurs ou les apprenants. Effectivement, il est bien rare qu’un apprenant réclame un soutien métacognitif. Le terme lui-même ne renvoie pas toujours les tuteurs à une définition claire et précise. La métacognition est formée de deux termes : le préfixe « meta » qui nous vient du grec et qui signifie au-dessus, à propos ; cognition qui est la faculté de connaître, l’acte par lequel se construit la connaissance. Ainsi, la métacognition est une activité mentale sur ses processus mentaux, une prise de recul réflexif sur ses manières d’apprendre, sur ses stratégies cognitives.
Le plan de support métacognitif rassemble donc les interventions tutorales permettant à l’apprenant de mieux se connaître comme apprenant et est en rapport direct avec l’apprendre à apprendre.
ME-AO. Une stratégie cognitive est une manière dont l’apprenant va s’acquitter d’une tâche d’apprentissage. Par exemple, pour mémoriser une liste d’une vingtaine de mots, il peut les lire et les relire, les écrire, les organiser au sein d’une carte ou d’un tableau, les enregistrer et se les passer en boucle, utiliser, comme le font les champions de la mémoire, une image mentale sur laquelle il dispose les mots en recourant à l’analogie, etc. Toutes les manières de mémoriser cette liste de mots sont des stratégies cognitives. A l’âge adulte, ces dernières sont très installées chez l’individu, tout simplement parce que ses expériences lui ont permis d’éliminer les stratégies qui ne se révèlent pas efficaces pour lui. Le revers de la médaille est que l’adulte se contente souvent de quelques stratégies cognitives qui ont sa préférence mais qui ne sont pas toujours adaptées aux tâches qu’il doit réaliser. Le premier pas pour améliorer ou diversifier ses stratégies cognitives est de connaître celles que l’on utilise habituellement. Le tuteur peut ainsi transmettre un questionnaire composé de situations d’apprentissage et de propositions de stratégies sur lequel l’apprenant doit situer son usage. Cette simple activité permet à l’apprenant de prendre conscience de ses méthodes préférentielles d’apprentissage. Il est également possible de proposer une autre activité plus exigeante pour l’apprenant qui consiste à tenir un journal de formation dans lequel il note, tout au long de son parcours de formation, les stratégies cognitives dont il use.
ME-OR. Comme nous l’avons vu dans l’intervention « C-OR », l’apprenant est souvent en prise à des difficultés d’ordre temporel tant pour trouver le temps de son apprentissage que pour tenir les échéances. Outre les conseils que le tuteur peut lui donner sur les techniques de planification, il peut également lui proposer différents calendriers en fonction du temps global que l’apprenant pense pouvoir consacrer chaque semaine à son apprentissage. Ceux-ci ne sont pas tant à considérer comme des prescriptions ou des consignes que des propositions que l’apprenant doit faire siennes. Aussi, la meilleure preuve de l’efficacité de ses interventions sur ce sujet, que le tuteur peut avoir, est la transmission par l’apprenant de son planning personnel de formation.
ME- PE. Quel que soit le soin apporté à la conception d’un dispositif de formation et des services tutoraux qui lui sont associés, il ne sera jamais parfait, ne correspondra qu’imparfaitement aux attentes et aux besoins des apprenants. Il est donc très important, dès lors que l’on vise une amélioration continue de la formation et du tutorat, d’ouvrir un « bureau des pleurs » où les apprenants peuvent exprimer leurs insatisfactions et desiderata. Toutefois, pour qu’il soit pleinement utile, il doit aussi comporter un espace de propositions formulées par les apprenants qui apportent des solutions aux problèmes soulevés. Cette responsabilisation des apprenants limite fortement l’expression des réclamations gratuites et a également le mérite d’associer les apprenants à la définition de l’expérience formative qu’ils vivent. Le tuteur a donc un rôle éminent dans l’organisation de cette activité qui peut être réalisée de différentes manières. Il peut s’agir d’un forum, d’un dialogue lors des regroupements présentiels ou en classe virtuelle, d’un questionnaire… Le travail du tuteur ne se limite pas à enregistrer les propos échangés mais devrait également aboutir à la production d'une synthèse pour laquelle les cartes mentales se révèlent bien adaptées. Enfin, il peut faire remonter ces informations aux concepteurs et responsables du dispositif qui prendront en compte ou non les propositions faites. Pour ceux qui souhaitent aller plus loin sur ce sujet, je les invite à lire le témoignage que j’ai fait d’une telle activité au sein d’un master (cf. La co-construction avec les apprenants à distance des services tutoraux. In Le tutorat de pairs dans l'enseignement supérieur, ouvrage collectif sous la direction de Cathia Papi, L'Harmattan, Savoirs et formation. 2013).
ME- SAM. Les activités collaboratives sont devenues un incontournable du digital learning, tant pour des raisons pédagogiques que d’autres plus matérielles comme la réduction des travaux à évaluer. Toutefois, les aptitudes à la collaboration sont inégales selon les individus et il est opportun, en amont d’une activité collaborative, d’amener les apprenants à faire le point sur leurs expériences passées. Là encore, le forum, parce qu’il est écrit et que la rédaction d’une contribution demande un minimum de réflexion, se révèle être un bon support. Il est préférable que le tuteur donne l’exemple et comme dans l’intervention « SA-AO » traitée précédemment, utilise un canevas. Celui-ci peut comporter des rubriques de ce genre : présentation de la situation collaborative vécue (contexte, acteurs, objectifs visés) ; organisation de l’équipe collaborative (rôles, tâches, planning, mode de prise de décision) ; les aspects positifs et négatifs de l’expérience ; les erreurs à éviter et les bonnes pratiques à mettre en œuvre ; l’intérêt que l’on porte ou non au travail collaboratif, etc.
ME- TEC. Les outils utilisés dans un digital learning sont souvent nombreux et présentent des caractéristiques qui les désignent pour certains usages. Il est à noter qu’à côté des usages prescrits, les usages pédagogiques d’un outil sont souvent le résultat d’un détournement de ses fonctions. Ainsi, si une classe virtuelle est d’abord prescrite pour transposer à distance la situation d’un exposé en présentiel, elle peut être utilisée pour d'autres buts tel que l’entretien individuel avec un apprenant. Le bon usage d’un outil est toujours celui qui convient et permet à l’utilisateur de réaliser ce qu’il souhaite. Aussi, il n’est pas inintéressant que le tuteur suscite une prise de distance réflexive sur les usages que l’apprenant a des outils. Pour ce faire, il peut lui proposer une grille d’évaluation permettant de qualifier les fonctions de l’outil (type de communication, média supporté, persistance du message, modalités, etc.) et les usages qui peut en être fait et les comparer avec les siens.
ME- MET. Le développement des stratégies cognitives de l’apprenant peut être supporté par la mise à disposition de ressources sur l’apprendre à apprendre. Cela suppose que le tuteur fasse un minimum de veille sur le sujet et en transmette les résultats aux apprenants. Plus simplement, le tuteur peut sélectionner quelques ressources et en donner accès aux apprenants. Sur ce point, l’université de Lille 3 propose depuis 2007, un site tout à fait digne d’intérêt. De même, le site québécois MétaTIC, bien qu’il ne semble plus très actif, rassemble des ressources intéressantes.
ME -EVA. L’autoévaluation est certainement une activité cognitive de haut niveau qui signe également un exercice accompli de son autonomie par l’apprenant. Néanmoins, tous les apprenants ne sont pas des spécialistes de l’évaluation, voire n’ont jamais été en situation de concevoir des activités d’évaluation. Pour soutenir l’autoévaluation des apprenants, le tuteur peut tout d’abord les informer des intérêts d’une telle pratique puis présenter les principes de base de la conception d’une évaluation. En particulier les notions de référent, de critères et d’indicateurs sont celles qui posent souvent des difficultés de compréhension.
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